Humeurs changeantes: et si c’était un trouble borderline?

« Je ne comprends pas pourquoi tu es si distant aujourd’hui, hier tu étais tellement proche de moi… » Vous avez peut-être entendu cette phrase ou vous l’avez prononcée vous-même. C’est comme une danse étrange, où l’on passe du rapprochement intense à un éloignement soudain, sans toujours comprendre ce qui a déclenché ce changement. Vous vous sentez…


« Je ne comprends pas pourquoi tu es si distant aujourd’hui, hier tu étais tellement proche de moi… » Vous avez peut-être entendu cette phrase ou vous l’avez prononcée vous-même. C’est comme une danse étrange, où l’on passe du rapprochement intense à un éloignement soudain, sans toujours comprendre ce qui a déclenché ce changement. Vous vous sentez pris dans un tourbillon d’émotions contradictoires, oscillant entre un besoin désespéré de proximité et une peur paralysante de l’abandon.

Le trouble de la personnalité borderline, ou trouble de la personnalité limite, est une réalité déstabilisante pour ceux qui en souffrent et souvent incompréhensible pour ceux qui les entourent. Une personne avec ce trouble éprouve un besoin constant de tester la solidité des liens avec les autres, tout en vivant dans la terreur du rejet. Ces fluctuations émotionnelles peuvent se traduire par des comportements en montagnes russes : se montrer extrêmement proche un instant, pour ensuite se replier ou repousser l’autre dans la minute qui suit.

Ces comportements imprévisibles sont déroutants pour les proches, qu’ils soient des collègues, des amis ou des partenaires. Par épuisement ou par nécessité de préserver leur propre équilibre, ils peuvent finir par prendre de la distance. Ce retrait ne fait souvent qu’accentuer la douleur et la solitude de la personne borderline, alimentant encore davantage ses troubles.

Pourtant, il est possible de stabiliser ce trouble. Avec un réseau de soutien bienveillant et un accompagnement thérapeutique adapté, la personne qui souffre de ce trouble peut apprendre à mieux gérer ses émotions, à renforcer ses relations et à retrouver un certain équilibre intérieur.

Dans cet article, nous explorerons les origines du trouble borderline, ses manifestations, ainsi que les différentes voies d’accompagnement pour les personnes concernées.

1-Les Origines du Trouble de la Personnalité Borderline

Le Trouble Borderline comme Etat Limite

Le trouble de la personnalité borderline, souvent mal compris, appartient à une catégorie de troubles dits « états limites », comme les troubles narcissiques ou antisociaux. Ces troubles trouvent souvent leur origine dans un traumatisme désorganisateur survenu très tôt dans la vie. Ce premier trauma peut même se produire in utero, par exemple, lorsque la mère subit des violences ou un deuil important. Il peut également survenir après la naissance, si le bébé grandit avec un parent émotionnellement absent ou est exposé à des violences physiques ou psychologiques.

Ces traumatismes précoces perturbent le développement normal de l’enfant. L’enfant cesse alors de se structurer et entre dans un état de latence qui le place dans la catégorie des états limites. Ces personnalités se situent quelque part entre les états névrotiques (où la réalité est encore perçue de manière cohérente) et psychotiques (où la réalité peut être totalement déformée). Par exemple, une personne perverse narcissique se rapprochera davantage de l’état limite psychotique, tandis qu’une personnalité histrionique — caractérisée par des réactions émotionnelles excessives et une quête d’attention constante — se rapprochera plutôt de l’état limite névrotique.

Des mécanismes de soutien sensibles

le trouble borderline, un besoin de tuteurs extérieurs pour croitre

Pour compenser ce manque de structure interne, ces enfants développent des mécanismes de soutien, des « étayages », pour parvenir à grandir. Imaginez une fleur qui, ayant cessé de croître naturellement, a besoin de tuteurs tout au long de sa vie pour rester droite. Ces « tuteurs » psychologiques peuvent aider à soutenir la personne, mais ils peuvent aussi la pousser à développer un faux self, une personnalité « as if », faite de traits empruntés à l’environnement, car elle n’a pas pu construire une identité solide à partir de son propre développement intérieur.

Cependant, un deuxième traumatisme désorganisateur peut parfois survenir et déstabiliser ces mécanismes de soutien. Ce second choc peut prendre de nombreuses formes : un deuil, une séparation, un déménagement, ou même un autre changement de vie significatif. Lorsqu’un tel événement survient, la personne borderline peut alors perdre ses « étayages » — par exemple, un partenaire qui la soutenait. Ce vide devient alors le déclencheur des symptômes du trouble borderline. Des comportements émotionnels extrêmes peuvent alors apparaître, même si la personne n’en montrait pas de signes auparavant.

2-Les Symptômes du Trouble de la Personnalité Borderline

L’Instabilité des Personnalités Borderlines

L’une des caractéristiques les plus frappantes du trouble de la personnalité borderline est l’instabilité, qui se manifeste dans de nombreux aspects de la vie de la personne qui en souffre. Cette instabilité touche aussi bien le sentiment d’identité personnelle que le contrôle des impulsions et des émotions. Le « moi » de la personne borderline est clivé, ce qui signifie qu’il n’y a pas de continuité entre les différents aspects de sa personnalité. Elle peut passer, sans raison apparente, d’une vision de soi ou des autres entièrement positive à une vision totalement négative, ou encore d’un état d’hyperactivité à une apathie profonde, parfois en l’espace de quelques minutes.

Comme mentionné précédemment, ce besoin de tester en permanence la solidité des relations, mêlé à une terreur intense de l’abandon, peut être extrêmement éprouvant pour l’entourage. Les proches peuvent se sentir épuisés et déstabilisés par ces comportements imprévisibles et contradictoires.

Le Passage à l’Acte

le trouble bordeline, agir sous le coup de l'impulsivité

Une autre caractéristique commune chez les personnes atteintes de trouble borderline est leur tendance à passer directement à l’acte. Contrairement à quelqu’un qui prendrait le temps de réfléchir et de planifier une action en fonction du contexte (par exemple, en évaluant si c’est le bon moment pour parler à une personne), la personne borderline agit souvent sur l’impulsion du moment, sans passer par cette phase de réflexion. Si elle ressent le besoin d’entrer en contact, elle le fera immédiatement; si elle est en colère, elle peut exploser sans retenue. Ce manque de « filtre » entre la pulsion et l’action rend les relations et les interactions sociales très complexes et souvent conflictuelles.

Ce passage à l’acte impulsif peut s’exprimer de deux façons : il peut se tourner vers l’extérieur, entraînant des comportements violents ou agressifs envers les autres, ou il peut se retourner contre la personne elle-même, par des comportements auto-punitifs ou destructeurs, tels que l’automutilation ou les tentatives de suicide.

Lorsqu’une personne souffrant de trouble borderline ressent une émotion intense, elle peut avoir du mal à discerner si cette émotion provient d’un véritable besoin personnel ou si elle est une réponse à une menace — réelle ou imaginée. Cette confusion interne alimente souvent des réactions disproportionnées et inattendues, qui finissent par nuire à ses relations et à son bien-être.

Les Critères du DSM

Pour ceux qui se demandent quels sont les critères diagnostiques officiels du trouble de la personnalité borderline, voici ceux du DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux), qui aident à mieux comprendre ce trouble :

  • Efforts frénétiques pour éviter des abandons réels ou imaginés.
  • Relations interpersonnelles instables et intenses, marquées par des alternances entre idéalisation excessive et dévalorisation.
  • Perturbation de l’identité avec une instabilité marquée et persistante de l’image ou de la notion de soi.
  • Impulsivité dans au moins deux domaines potentiellement dommageables pour le sujet (par exemple, dépenses inconsidérées, comportements sexuels à risque, toxicomanie, conduite automobile dangereuse, crises de boulimie).
  • Répétition de comportements, de gestes ou de menaces suicidaires ou d’automutilations.
  • Instabilité affective due à une réactivité marquée de l’humeur.
  • Sentiments chroniques de vide.
  • Colères intenses et inappropriées ou difficultés à contrôler sa colère.
  • Idéation persécutoire ou symptômes dissociatifs sévères apparaissant de manière transitoire en réponse à un stress intense.

Ces critères aident à mieux cerner ce trouble complexe et à comprendre pourquoi il peut être si envahissant et douloureux, à la fois pour la personne concernée et pour son entourage.

3-L’Accompagnement Thérapeutique pour les Personnes Souffrant du Trouble de la Personnalité Borderline

Contenir

Pour les personnes souffrant du trouble de la personnalité borderline, l’accompagnement thérapeutique joue un rôle crucial. En effet, ces personnes manquent souvent de « contenance psychique » : elles ont du mal à contenir leurs émotions, se sentent souvent éparpillées, et passent facilement à l’acte, sous l’effet d’une impulsion. C’est là que l’accompagnement thérapeutique devient essentiel, en leur offrant un cadre sécurisant et structurant.

Le travail du thérapeute commence par la mise en place d’un cadre thérapeutique stable et rassurant. Cela passe par la régularité des séances, le respect des horaires, et la continuité du lieu de rencontre. Ces éléments, qui peuvent sembler anodins, constituent en réalité le socle fondamental de la relation thérapeutique. Pour une personne borderline, avoir un repère fiable est primordial pour commencer à se sentir en sécurité et pour réduire l’instabilité émotionnelle.

Le Travail sur les Fluctuations Emotionnelles de la Personnalité Borderline

Le thérapeute doit également incarner une figure de stabilité. Il est important qu’il soit ancré et solide pour pouvoir accueillir et supporter les fluctuations d’humeur de son patient. Par exemple, il peut être perçu comme « le meilleur thérapeute » au début d’une séance, pour devenir « le pire » quelques minutes plus tard. Il doit donc savoir se recentrer rapidement, sans se laisser déstabiliser par ces changements brusques de perception. Cette stabilité aide à établir une relation de confiance et permet à la personne borderline de commencer à explorer ses émotions dans un cadre sécurisant.

Un autre aspect essentiel de l’accompagnement est la capacité du thérapeute à poser des limites claires et à « tenir bon » face aux débordements émotionnels. Cela signifie qu’il doit être prêt à accueillir des passages à l’acte, comme un arrêt soudain de la thérapie, sans en faire une fin définitive. Au lieu de rompre la relation comme cela peut arriver dans l’entourage personnel de la personne borderline, le thérapeute doit être prêt à l’accueillir de nouveau, offrant ainsi une stabilité et une constance souvent absentes ailleurs.

Revenir au Corps

Le travail thérapeutique doit aussi viser à amener la personne borderline à cesser de sur analyser et à revenir à son corps, à ses sensations et à ses émotions. L’objectif est de l’aider à apprivoiser ses ressentis et à différencier ce qui provient de l’extérieur et ce qui appartient à sa propre expérience intérieure. Cela permet de travailler « ici et maintenant », dans le cadre d’une relation thérapeutique solide. À cet égard, les approches centrées sur le corps et sur le moment présent sont souvent plus bénéfiques que les approches purement analytiques ou intrapsychiques, comme la psychanalyse, qui pourraient renforcer l’instabilité en l’absence de travail sur la relation.

Développer la Fonction Moi

Par ailleurs, l’un des objectifs thérapeutiques sera d’apprendre à la personne à développer une meilleure fonction « moi » pour limiter les passages à l’acte impulsifs. Le fonction « moi » est la transformation de l’impulsivité au contact de l’environnement. Cela permet d’avoir des relations plus régulées avec les personnes autour de soi. Cela implique un travail sur la maîtrise des impulsions et des affects. En même temps, il est crucial d’aider la personne à trouver des moyens plus sains d’extérioriser ses émotions, par exemple à travers des activités physiques comme la boxe ou tout autre sport qui lui permet de canaliser son énergie de manière positive.

Enfin, tout au long du processus thérapeutique, l’accent doit être mis sur la reconnaissance et l’acceptation de la personne borderline en tant qu’individu unique, digne d’amour et de respect. Ce sentiment de reconnaissance et d’appréciation peut aider à renforcer son estime de soi et à réduire sa peur constante de l’abandon.

Si vous souhaitez en savoir plus ou me consulter, n’hésitez pas à me contacter via ce lien.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *