Dans notre quête constante de sérénité, il peut être tentant de mettre nos émotions de côté pour maintenir la paix apparente. Mais que se cache-t-il derrière cette façade de calme ? Quand les émotions sont systématiquement réprimées, quelles en sont les conséquences ? Et surtout, comment pouvons-nous trouver le juste équilibre entre une expression authentique de nos émotions, bénéfique pour nous-mêmes, tout en préservant l’harmonie dans nos relations ?
Dans cet article, nous explorerons ces questions avec bienveillance et ouverture, cherchant des réponses pour une vie émotionnelle épanouie.
La Répression des Émotions : Comprendre les Origines et Trouver un Chemin vers l’Expression Saine
Penchons nous sur la répression émotionnelle. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi certaines personnes semblent garder leurs émotions si profondément enfouies qu’on ne sait jamais vraiment ce qu’elles ressentent ? Peut-être avez-vous déjà rencontré quelqu’un qui semble être un expert en dissimulation émotionnelle? Dans notre société où le calme et la neutralité sont souvent valorisés, la répression émotionnelle peut sembler être un moyen de survie. Mais derrière cette façade de tranquillité, se cachent parfois des émotions refoulées, des besoins non exprimés et des souffrances invisibles.
Dans cet article, nous explorerons les différentes causes de la répression émotionnelle, des messages éducatifs aux dynamiques relationnelles, et nous chercherons des pistes pour une expression émotionnelle plus équilibrée et authentique
L’éducation et la répression des émotions
En fait, exprimer ses émotions comme de la colère, de la tristesse ou autre peut être vu comme un signe de faiblesse, surtout chez les hommes. Certaines phrases dites éducatives ont la vie dure et peuvent conditionner l’expression des émotions. Des phrases comme « un garçon, c’est fort, ça ne pleure pas » ou « après tout ce que je fais pour toi, tu es bien ingrat de me faire des reproches » ou « cet enfant doit manquer de sommeil pour se mettre dans cet état » peut induire de la culpabilité voir de la honte chez l’enfant. En effet, non seulement il n’a pas trouvé de soutien dans son expression émotionnelle mais cette expression s’est, au contraire, retournée contre lui.
Cela peut marquer profondément l’enfant qui va faire un lien entre l’expression de ses émotions et un sentiment douloureux de culpabilité ou de honte. Ces phrases qui paraissent anodines peuvent nourrir une blessure de rejet qui va pousser l’enfant à ne plus exprimer ses émotions ou pire, à les anesthésier complètement. Pour ne pas se sentir rejeté, l’enfant et ensuite l’adulte va préférer ne plus laisser parler ses émotions.
Le non accueil des émotions chez l’enfant
L’enfant peut ne pas se sentir accueilli dans ses émotions par ses figures d’attachement principaux, souvent les parents. Il peut arriver que ceux-ci soient indifférents vis à vis des besoins de l’enfant ou dans un état dépressif et ne puissent pas émotionnellement s’occuper de leur enfant. Quand cela se produit, l’enfant ne va pas se sentir digne d’intérêt pour ses parents. Un enfant ne remet jamais en question le comportement de ses parents. Il va systématiquement prendre à son compte leurs « défaillances » car il a besoin de les voir parfaits pour se sentir lui, en sécurité.
La problématique est que, à l’âge adulte, cette personne risque d’avoir gardé la même croyance erronée à son sujet. Elle va croire qu’elle n’est pas digne d’intérêt et peu légitime à exprimer ses émotions et ses besoins. C’est une personne qui va s’effacer dans son couple, prendre sur elle en faisant le dos rond. Ou elle va râler mais ne va pas exprimer ses besoins de manière ajustée.
La dépendance affective ou la répression des émotions
Les personnes au profil dépendant affectif sont sujets à la répression émotionnelle car elles manquent d’estime d’elles-mêmes et donc ne se sentent pas légitimes à exprimer leurs émotions et leurs besoins. Ou si elles les expriment c’est de manière dérégulée car elles expriment leur insécurité d’enfant et non pas leurs émotions d’adulte. Pour plus d’informations sur la dépendance affective, je vous invite à lire mon article de blog « La colère dans la dépendance affective: origines et solutions » en cliquant ici.
Les conséquences de la répression émotionnelle
L’importance de l’expression de sa vitalité
Prendre sur soi de manière systématique pour ne pas envenimer la situation est une intention louable à la base mais elle peut avoir des conséquences néfastes sur la santé mentale et physique.
En Gestalt, la thérapie que je pratique, le principe de base est l’expression de sa vitalité. On travaille sur ce qui entrave cette expression comme par exemple, une mauvaise estime de soi même qui pourrait se traduire par un manque de légitimité à s’affirmer et à affirmer ses besoins.
Un des blocages dans l’expression de la vitalité est la rétroflexion. C’est un mouvement qui conduit à retourner son énergie vitale contre soi-même. Quand un homme a entendu plusieurs fois, enfant, que pleurer, c’était bon pour les filles, il pourra avoir tendance à réprimer tout signe de tristesse. Cela s’applique aussi à la colère et l’adulte pourra réprimer sa colère si enfant, il s’est senti honteux en exprimant son désaccord.
Les conséquences psychologiques et physiques
Le problème est que les émotions, si elles sont étouffées, ne disparaissent pas et l’énergie réprimée peut avoir des conséquences néfastes sur la santé. La personne qui réprime ses émotions peut se demander pourquoi elle souffre d’indigestion chronique ou elle va se réveiller, un beau jour, avec le dos bloqué sans comprendre pourquoi.
Le corps nous parle, il a son propre langage et il est crucial de l’écouter pour ne pas accumuler les inconforts physiques et les maladies chroniques. Certaines expressions du langage quotidien sont d’ailleurs imagées et reflètent autant les tensions physiques que les tensions mentales. Par exemple, nous disons couramment, « cela me reste sur l’estomac » pour parler d’une injustice qui pèse. Ou « j’en ai plein le dos » peut se rapporter à un cumul de non-dits et de situations insatisfaisantes dont on a du mal à se sortir.
Au niveau psychologique, la répression des émotions peut conduire à la déprime ou à la dépression. L’énergie vitale quand elle est exprimée de manière régulée fait avancer, nous pousse à aller vers l’autre, à construire et à s’engager. Mais quand elle est réprimée, elle se traduit par de la tristesse, du vide et de l’ennui. On peut avoir une perte de sens et de but dans sa vie et ne plus avoir envie de rien. Il est donc important de prendre au sérieux les signes d’ennui et de désintérêt pour en prendre soin rapidement.
Les conséquences sur la vie relationnelle
La répression des émotions dès le plus jeune âge façonne la personnalité. La personne qui a réprimé ses émotions pour ne pas se sentir rejeté peut avoir développé une personnalité froide et en contrôle. C’est une personne qui va avoir peur inconsciemment de se laisser « déborder » par ses émotions. En fait ce « déborder » est l’expression de sa chaleur humaine et de sa spontanéité qui n’ont pas été accueillies quand elle était enfant. Elle pourra avoir du mal à partager son intimité émotionnelle ce qui peut causer des incompréhensions dans sa famille.
Les personnes qui n’ont pas pu se différencier ou poser leurs limites par peur de se sentir rejetées ou abandonnées, peuvent devenir confluentes. Cela signifie qu’elles vont se fondre dans la masse. Elles vont abandonner leur désir et adopter le désir de leur interlocuteur ou d’un groupe pour ne pas se sentir rejetée. N’oublions pas que, chez adulte, les peurs de l’enfance sont toujours actives. L’adulte agira comme l’enfant qu’il était car ses peurs sont plus fortes que le désir d’apparaître.
L’enjeu va être pour ces personnes d’extérioriser leurs émotions car, réprimées, elles sont source de mal être et de plus amputent ces personnes d’une part importante de leur personnalité.
L’expression émotionnelle authentique
Que veut dire une expression émotionnelle authentique?
Une expression émotionnelle authentique passe par être en contact avec soi-même, être en contact avec son entourage et savoir extérioriser ce que l’on ressent de manière régulée.
D’abord, une émotion est ressentie corporellement. Elle peut se manifester par une sensation de coup de poing dans le ventre qui laisse place à une vague de colère. Ensuite, la personne va faire un choix: elle va choisir ou non de s’exprimer en contact avec elle-même et avec son environnement.
Là, c’est quand la personne exprime ses émotions de manière régulée. Mais, il peut arriver que le besoin de défouler son impulsivité soit plus importante que l’objet et la personne visée. C’est ce que l’on appelle un passage à l’acte. On passe directement du ressenti à une décharge rapide. Il n’y a pas « l’entonnoir » du choix qui permet de garder pour soi sa colère, de la différer pour en faire part plus tard ou de lui donner une forme socialement acceptable.
Par exemple, si votre conjoint vous fait un reproche pour la 3eme fois de la journée et si vous lui hurlez dessus à la 3eme fois, le contact entre vous risque d’être coupé et difficile à rétablir. Si vous partagez là où vous en êtes: « C’est la 3eme fois que tu me rappelles de sortir le chien, là je sens que j’en ai assez. », vous avez choisi de l’exprimer à votre partenaire en conscience de votre personne et de sa personne.
Le passage à l’acte est un cas extrême où on n’est plus en contact avec soi et avec l’autre. On perd le sens des réalités. Mais une expression atrophiée de ses émotions vient également de résistances qui dévient ou bloquent l’énergie vitale. Dans ce cas, on reste en contact avec soi et avec l’autre mais les émotions ne sont pas exprimées comme on le souhaiterait et on peut s’en vouloir de cette situation.
Pourquoi je n’arrive pas à m’exprimer de manière juste?
Alors d’abord, si c’est votre cas, essayez de ne pas vous culpabiliser. Si de manière chronique, vous laissez tomber votre colère et vous ne l’exprimez pas, c’est sûrement que, dans votre enfance, vous avez senti qu’il était préférable pour vous de la réprimer.
Je vous ai cité l’exemple de la rétroflexion, c’est à dire la répression de la colère. J’ai également évoqué la confluence ou l’anesthésie de ses émotions pour se rallier aux émotions des autres.
Des projections peuvent également entraver le contact régulé. Une projection est le fait d’envoyer sur l’autre ce qui nous appartient mais qu’on a du mal à s’approprier. Par exemple, on n’a pas conscience que l’on a une mauvaise image de soi-même. On va projeter cette part de nous sur l’autre et on peut imaginer que l’autre personne nous méprise ce qui peut déréguler l’expression des émotions.
Derrière ces schémas qui se reproduisent, il y a le lien. Chaque être humain est prêt à faire des concessions énormes sur sa personne pour conserver le lien avec ses figures d’attachement, souvent ses parents. Comme évoqué, il peut être plus sécure pour un enfant de garder pour lui ses émotions pour ne pas risquer de perdre le lien avec les figures d’attachement.
A la base, ce sont donc des adaptations que vous avez intégrées pour conserver votre sécurité matérielle, affective et émotionnelle sans lesquelles nous ne pourrions pas survivre. Il n’empêche que ces concessions sur soi faites à un jeune âge peuvent devenir pesantes voir handicapantes dans la vie affective et relationnelle.
Comment développer une manière juste d’exprimer ses émotions?
Le retour au corps aide à réguler ses émotions et à les exprimer plus en contact avec soi et avec les autres.
Par exemple, si vous vous trouvez dans une situation dans laquelle vous sentez que vos émotions débordent, reprenez conscience de votre ancrage. Vos deux pieds bien ancrés dans le sol vous aideront à faire face à la situation. Si vous êtes assis à ce moment-là, prenez le temps de sentir le dossier dans votre dos, vos bras sur vos accoudoirs. Prendre conscience de ses sensations corporelles est une stratégie de gestion émotionnelle efficace car elle permet de revenir dans l’ici et maintenant de la situation.
Une autre stratégie de gestion émotionnelle est de chercher des ancrages extérieurs. Cela permet de ne pas exprimer ses émotions trop vite. Est ce que vous pouvez vous appuyer par le regard sur un objet qui est à vous, une photo dans un cadre ou autre? Est ce que vous pouvez vous appuyer sur le regard de quelqu’un ou sentir sous vos doigts le pelage réconfortant de votre animal domestique? Prendre le temps de respirer et de sortir de la situation qui provoque ce débordement émotionnel en cherchant de l’ancrage ailleurs, permet souvent de faire retomber la tension.
Et une des pistes que je peux proposer pour apprendre à réguler ses émotions, c’est de prêter attention à vos sensations corporelles quand elles se présentent. Souvent les personnes débordent émotionnellement car elles ont pris beaucoup sur elles et comme une cocotte-minute trop mise sous pression, elles débordent. Prêter attention aux sensations corporelles quand elles apparaissent comme un petit bouillonnement au fond de l’estomac, à la température du corps qui augmente ou à la tension dans les épaules permet de s’exprimer quand la tension est encore gérable.
Rester à l’écoute de ses ressentis aide à agir de manière régulée. Quand on sent des crispations dans le ventre, on peut identifier de la colère et choisir de s’isoler un moment ou de poser ses limites de manière claire.
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